Race with the devil on a southern highway

Il est des oeuvres qui plongent quiconque tente d’en parler dans le doute. Pas parce qu’on ne sait trop quoi en penser, bien au contraire. Mais parce que certaines oeuvres prennent vie, plus encore que d’autres, dans le regard de ceux qui les découvrent. Et que les sensations provoquées par ces oeuvres-là sont brutes, contrastées, voire paradoxales. Pas en raison de leurs qualités artistiques, mais du message, voire de la philosophie, qu’elles véhiculent.

Autant le dire tout de suite. Pour Lost Highways, The Devil’s Rejects est un grand film. Ce qui, pour les Inrocks ou Télérama, nous ravalerait illico au rang de sadique, avide de tortures, de brutalité gratuite et de sauvagerie.

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Dans un monde où la production cinématographique, de celle des majors à celle, faussement subversive, des rebelles de salon, est devenue policée et d’un ennui insondable, Devil’s Rejects est un OVNI. Un pur shoot d’adrénaline, irrespectueux, indécent. Irrésistiblement drôle, cruel et bouleversant.

Le genre de film qui, s’il nous était tombé sous la main à quinze ans, aurait changé notre vie. Pas en faisant de nous des psychopathes ou des tueurs en série, mais en électrisant durablement notre adolescence. En nous montrant que tout manichéisme est une invention, et que les freaks ont un coeur. Mais surtout que la violence, même graphique et jouissive, a des conséquences terrifiantes.

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C’est cela qui fascine dans The Devil’s Rejects. Le talent rare dont fait preuve Rob Zombie, metteur en scène, scénariste, producteur et compositeur, pour livrer un film tellement parfaitement pensé, écrit et caractérisé, que rien n’est jamais définitif. Que tout est complexe, au sein d’un scénario pourtant d’une simplicité absolue. Et que nul n’est un monstre ou un héros.  Que les flics ne sont pas des redresseurs de torts chevaleresques, et que même les rednecks les plus marginaux, violents et psychotiques dissimulent tant bien que mal une part d’humanité.

Certains verront The Devil’s Rejects comme une insupportable série de tortures physiques et psychologiques. Un film vicelard et complaisant. Mais The Devil’s Rejects n’est pas Hostel, et Zombie n’est pas Eli Roth.

La violence inouïe et terriblement réaliste de The Devil’s Rejects, peut être traumatisante. Alors qu’Hostel et ses innombrables resucées sont des séries Z à la violence outrancière de cartoon, sans grand danger pour les spectateurs.

Et pourtant, The Devil’s Rejects est loin d’être gore. C’est la force de l’interprétation, les tabous piétinés, l’intelligence de la mise en scène, et les morceaux de musique rythmant les scènes violentes qui lui donnent une force stupéfiante…

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La famille Firefly est composée de dégénérés. On avait découvert leurs macabres activités dans The House Of Thousand Corpses. Pour faire simple, des rites satanistes et des ripailles à base de chair humaine.

The House of Thousand Corpses était un film d’horreur, biberonné à Massacre à la Tronçonneuse. Original, sans être inoubliable. La suite, The Devil’s Rejects, est un pur road movie sanglant sous perfusion de Southern Rock.

Le film débute alors que le shériff Wydell (Willam Forsythe, minéral et retors) veut venger coûte que coûte son frère, assassiné par les Firefly. Il donne l’assaut à la maison familiale, d’où parviennent à s’enfuir Otis et sa soeur Baby. Commence une cavale durant laquelle ils vont retrouver leur père, Captain Spaulding, le clown dégénéré. Une cavale qui accumulera les victimes collatérales, jusqu’à une fusillade finale ravageuse sur une route désertique, au son du Freebird de Lynyrd Skynyrd.

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Zombie malmène les clichés habituels, défonce les interdits avec une brutalité sans égale, aligne les postures iconiques (Shery Moon Zombie, baddest and sexiest bitch ever…) et les scènes dantesques, où la crasse, la boue et le sang, baignées d’une lumière aveuglante, nous explosent à la gueule.

Certains d’entre vous verront dans ce film une apologie dégoûtante de la violence, d’autres un film hard boiled inoubliable, d’une humanité malade, et tranchant comme une faux.

S.B.

 

 

 

 

2 commentaires sur « Race with the devil on a southern highway »

  1. C’est l’affiche du film qui m’avais décidé. Je ne connaissais pas Rob Zombie, ni vu son premier film ( la maison des 1000 morts). J’ai à la fois détesté et adoré ce film. Détesté car on est en perte totale de repères, tout est atomisé, le bien et le mal, la morale, Les gens bien qui tournent mal et les méchants qui deviennent pires et je parle même pas du gore avec son lot de sang versé et de corps martyrisés, mais c’ est pas l’élément principal du film. J’ai adoré parce que c’est aussi un road-movie sauvage, sensuel et avec pas mal d’humour et même si on sait que ces » rebuts du diable » sont des meurtriers sadiques et sanguinaires, on peut pas s’empêcher de sympathiser avec eux dans certaines scènes. Et ça c’est très intéressant au cinéma, en tant que spectateur, arriver à apprécier des salauds qui nous auraient horrifié au journal de 20 H…Et puis la scène finale, l’assaut suicide sur fond de Lynyrd Skynyrd, avec les flammes des armes à feu qui dansent en osmose totale avec les rires démoniaques et les regards délirants…un grand moment d’émotion, on frôle le génie!

    Ce film est un bon gros fuck à la morale et aussi à l’industrie du cinéma et merci de lui rendre tout l’hommage qu’il mérite.

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